EDITORIAL N° 2004-3
L’année scolaire est terminée, elle a été difficile pour beaucoup d’entre nous, professeurs de Technologie, à cause des multiples atteintes dont notre discipline est actuellement l’objet. Celle à venir sera certainement tout aussi rude, notamment sur le plan des conditions d’enseignement et de mise en œuvre (horaires, groupes, salles, équipements...).
Il nous faudra encore et toujours nous montrer actifs, vigilants et combatifs et ce, dès les premières minutes de la pré rentrée ! Le C.A. vous engagent d’ailleurs à nous communiquer au plus vite (ainsi qu’à votre syndicat préféré, quel qu’il soit) vos conditions de travail surtout si elles sont inacceptables ou incluant des heures d’autres disciplines voire des dispositifs dérogatoires de type 4ème en alternance ou 3ème plus ou moins pré-professionnelles ou industrielle [1]
Elle a aussi été dense et riche en rebondissements avec la tenue du grand débat sur l’Ecole, la mise en place des commissions de relecture des programmes de collège et la réflexion sur la nouvelle organisation de la classe de troisième, point final du projet Lang. Un changement de ministre, une agrafeuse, un autre président de commission, un nouveau conseiller technique pas totalement inconnu et une loi sur la laïcité ont également ponctué cet ensemble déjà copieux !
Les réflexions ministérielles (encore en cours actuellement) ont remis fortement en cause notre discipline à plusieurs reprises : projet d’optionalisation de la Techno, remaniement de la classe de troisième avec suppression de l’option technologique, tentative de baisse des horaires avec création d’une heure « flottante » à se repartir entre disciplines scientifiques, création des options « découverte de la vie professionnelle » sans contenus ni cadrage pour le moment (ce projet de nouvelle organisation de la classe de 3ème, bien que refusé lors de la tenue du dernier CSE, a quand même été en partie adopté par le ministère et a été publié au J.O. le mardi 06/07/2004), refus de prendre en compte les conditions matérielles d’enseignement et la nécessité d’effectifs allégés et surtout projets de programmes de 6ème et de 3ème dénaturant totalement la discipline et la vidant de son sens tel qu’il fut défini en son temps par la COPRET. Il fut même question un moment d’en changer jusqu’à son nom !
Face à ces attaques, le rapprochement entre associations de Technologie s’est concrétisé et les relations avec les différentes centrales syndicales se sont renforcées lors de nombreuses audiences et séances communes de travail.
Ce ne fut pas toujours facile (lire le feuilleton de l’été en pages intérieures) mais le front commun de défense de la discipline a tenu bon et l’AEAT y a pris largement sa part d’initiatives, de propositions et de travail. Pour mémoire, les positions prises par le C.A. de l’AEAT dans le débat furent et restent les suivantes :
- Refus de la mise en chantier d’une réforme sans évaluation préalable et pertinente,
- Refus de l’optionalisation de la Technologie en 3ème,
- Refus de l’amputation des horaires Technologie et Sciences Physiques en 3ème,
- Opposition à la notion de pôle, dans le sens de champs disciplinaire,
- Opposition à la notion d’heure « flottante », susceptible de dérives administratives rapides (voir destin des IDD !),
- Refus de rapports de force et de marchandages entre disciplines, sur le terrain,
- Demande d’une reconnaissance officielle (décret de loi) de la notion de groupes allégés, permanente en Technologie et de groupes de TP en Sciences Expérimentales,
- DHG abondées en moyens raisonnables mais nécessaires à la mise en place de ces groupes (18 élèves maxi, plutôt 16 dans les établissements difficiles notamment), moyens tenant compte également de l’état des salles spécialisées utilisées (taille, aménagements, matériels, sécurité...),
- Définition et publication officielle des règles, normes et démarches d’aménagements et de sécurité en vigueur dans les salles spécialisées de Technologie, sur tout le territoire national. Communication de celles-ci aux collectivités locales propriétaires des bâtiments scolaires. (L’AEAT est prête à participer à une commission de travail officielle sur le sujet et ce sera un de ses thèmes d’Assemblée Générale, en novembre 2004 !).
L’action commune a permis de limiter la casse de la Technologie sur plusieurs points tels que l’optionalisation, la baisse de l’horaire et la création de l’heure dite « flottante », la mise en sommeil de la notion de pôle scientifique incluant la Technologie...
Par contre, la défense des contenus et des conditions de mise en œuvre reste toujours de mise et, plus que jamais, la nécessité de travailler ensemble s’impose ! L’action continue encore à ce jour et un texte commun Associations/Syndicats est en cours de signature. Ce texte dénonce l’absence d’évaluation de la discipline, préalable à tout projet de réforme et refuse catégoriquement la « rénovation » en cours, son expérimentation et sa mise en consultation !
En effet, la démarche suivie par le Ministère de l’Éducation Nationale semble plutôt erratique, peu rigoureuse et difficile à suivre :
- Affirmation de l’absence de contenus propres à la discipline puisque mettant en œuvre les connaissances acquises ailleurs (Préambule du projet).
- Propositions d’organisation sur des grilles vides de contenus au cycle central, non terminées en 3ème et chronologiquement illogiques.
- Programme de 6ème plus proche d’un discours de type science appliquée que technologique, avec des études de thèmes peu convaincants, un rappel constant de la notion d’utilisateur et de consommateur. On peut également y percevoir des réminiscences de feu la commission Laguarigue (années 1970), commission qui avait mis en place la technologie au sein des programmes de Physique (l’expérience ne dura guère !) : rappelez-vous la targette à pêne plat, la chaîne cinématique du porte-mine et l’étude des liaisons de l’arrêt de porte. Aujourd’hui, ce serait plutôt l’étude de la planche à roulettes à pêne plat !!!
- Non prise en compte des réalités de l’Ecole Élémentaire en matière d’informatique et de Sciences et Technologie (15% seulement des écoles délivre le B2i !) et abandon de la spécificité de notre discipline pour les apprentissage en technologie de l’information ; les TICE seront intégrés dans toutes les disciplines.
- Abandon de la plupart des missions définies par la COPRET (on ne retrouve que 35% de ses contenus dans les actuelles propositions de programme !), sans aucune justification ou analyse préalables, surtout dans le domaine des productions et réalisations des élèves qui risquent de se réduirent à des manipulations d’objets techniques ou à une réalisation unique pour la classe, réalisation s’arrêtant au stade du prototype (plutôt une maquette de principe, semble-il !).
A la lecture de ce projet de rénovation de nos programmes, on ne peut que constater le risque de voir la Technologie perdre son statut de discipline pour ne devenir qu’un enseignement plus ou moins transversal, pouvant être dispensé par n’importe quel enseignant, face à des classes entières et nombreuses. La France avait pourtant été saluée internationalement, en son temps, pour avoir eu le courage de créer cette nouvelle discipline.
Le Ministère de l’Éducation Nationale n’aurait-il plus de philosophie audacieuse, de ligne politique ambitieuse en matière éducative ? A moins que la rigueur budgétaire ne lui en tienne maintenant lieu !
Le CA de l’AEAT continuera, pour sa part, à défendre et valoriser la Technologie par tous les moyens dont il dispose. Dès la rentrée, la défense des conditions de mise en œuvre sera une de nos priorités. En attendant, il souhaite à chacun des vacances belles, ensoleillées et reposantes.
Les pavillons sous Bois,
le 08 juillet 2004
Le Président,
Christian HOUDRE.
[1] Sur ce dernier point, il est utile de rappeler que toute organisation pédagogique non réglementée par un décret de loi (programmes, dispositif expérimental avec protocole et mesures dérogatoires clairement définies...) est illégal et expose les enseignants (ainsi que le chef d’établissement) qui y participeraient à une totale responsabilité en cas d’incident, d’accident ou de plaintes de parents d’élèves. Une circulaire académique ou rectorale définissant une telle activité n’a pas valeur juridique et n’engage pas forcément la responsabilité de l’État, prudence donc !
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